L’ESPRIT EN ZAZEN


L’esprit en zazen nous permet de dépasser toutes nos limitations.

1)    L’esprit mushotoku

 

-      Ne rien chercher, ne rien fuir :

La pratique de zazen repose fondamentalement sur une attitude juste : ce qu’on appelle « mushotoku » en japonais, autrement dit « sans intention ». L’action que l’on mène en zazen, qui est « posture » donc par définition « action suspendue » est gratuite, désintéressée, elle se satisfait, elle ne vise aucun but.

C’est même précisément lorsque nous abandonnons tout but que nous pouvons immédiatement nous éveiller. En zazen, il ne faut pas chercher à faire le vide, ni chercher à développer une réflexion sur un sujet précis, même pas sur les enseignements du Bouddha comme nous le faisons ici.

-      Ne rien obtenir :

On dit qu’en zazen  il n’y a rien à obtenir. Ça ne signifie pas pour autant qu’il n’y ait pas d’effets à la pratique de la méditation. Cependant pourquoi n’y a-t-il rien à obtenir ? Simplement parce que nous sommes d’ores et déjà en unité avec l’univers. La sensation d’en être séparé provient de ce que notre esprit est agité par mille pensées, et que nous perdons de vue que tout est déjà là : c’est comme une vitre qui est salie, on ne voit plus à l’extérieur ; si on la nettoie, on voit tout.

 

2)    Un rythme de pensées différent

 

Lorsque nous nous oublions dans la concentration sur le corps et la respiration, peu à peu nos pensées s’apaisent. Quand on approfondit le zazen, la pensée et la non-pensée se succèdent. On découvre la nature véritable de nos pensées : la vacuité. Cette vacuité signifie que tout est sans substance propre, tout est seulement transformation.

Voyant les nuages dans le ciel, nous pensons que chacun a une forme bien précise, solide, réelle. Mais lorsqu’ils passent devant la lune on voit que cette forme n’existe pas, c’est seulement des gouttelettes d’eau en transformation, rien n’est immuable.

A partir de cette attitude, on peut stopper le mécanisme de la pensée effrénée qui nous assaille parfois au quotidien. On arrête de juger, de classer, de trier, de comparer, de projeter… bref on stoppe l’activité du cerveau gauche, le cerveau du langage. Notre cerveau se rééquilibre et s’oxygène, ce qui est favorisé par la posture de la tête.

 

3)    La conscience hishiryo

 

Cette conscience en zazen montre bien que notre esprit n’est pas limité par nos pensées. Au fond, notre esprit est vaste, très vaste même puisque notre véritable nature remplit tout l’univers. C’est là le paradoxe que le zen nous permet de dépasser : nous sommes à la fois un corps-esprit limité, une toute petite vague à la surface de l’océan, mais nous sommes aussi complètement infinis, il n’y a aucune séparation réelle nulle part. Aussi notre activité devient l’activité de l’univers lui-même. Nous redevenons ce que nous sommes profondément : connecté(e) à tout, le tout, c’est ce qu’on appelle Bouddha.

Cela s’accompagne du processus qu’on appelle éveil : chaque phénomène qui surgit dans la conscience est accueilli, vu puis abandonné (on dit qu’on laisse passer tous les phénomènes) : on peut le voir dans sa nature véritable, s’éveiller à la réalité de notre vie qui est impermanence, interdépendance et vacuité.

 

4)    Déjouer l’ego

 

En observant tout notre contenu mental, on peut finalement parvenir au point où on constate que ce que nous prenons pour un « moi » fixe, indépendant de tout le reste, séparé, immuable, n’a pas de réalité propre. Cette vision juste, loin de provoquer la panique que peut constituer cette découverte à l’approche de la mort, et qu’on associe à un nihilisme, est complètement libératrice.

Ce n’est pas nihiliste parce qu’il y a bien quelque chose, comme les 12 maillons de l’interdépendance l’ont montré, mais ce quelque chose n’est pas fixe, il est en perpétuelle évolution.

Lorsqu’on n’a plus à défendre un « moi » et un « mien » contre le reste du monde, la vie devient légère, on se ressent centré, équilibré, à sa juste place. On peut savourer le fait d’être vivant. C’est aussi ce point de départ qui inspire les valeurs du bouddhisme telles que la joie spirituelle, la compassion, la solidarité… on peut alors vivre sa vie davantage en harmonie.